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Les talibés et internet ?
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Le monde d’internet a affranchi les hommes des frontières, aboli les distances, on va-et-vient sans visa, ni passe. Depuis des années que je travaille avec les talibés et les marabouts, j’ai assisté à l’impact de l’internet sur la relation marabout-talibés. Ici je fais référence au daara que l’on nomme type 1 c’est dire les daaras avec un marabout et des talibés qui vont le matin ou le soir mendier de la nourriture. J’ai parlé avec des dizaines de talibés qui ont vécu une dizaine d’années au daara sans parler avec leur parent, ils n’avaient comme intermédiaire que le marabout qui leur donne des nouvelles parfois au gré de son humeur. Un de mes jeunes m’a raconté que de l’âge de 7 ans jusqu’à quinze il n’a parlé qu’une fois avec sa mère et qui une semaine plus tard était décédée après leur entretien téléphonique. En me racontant cette histoire, ce jeune qui était devenu un gaillard avait tellement pleuré que j’étais obligé de reporter le reste de l’entretien.
Aujourd’hui, plus de 90% de jeunes talibés adolescent ont un téléphone portable. Non seulement ils parlent avec leurs parents, mais aussi les amis au village , les parents en Europe , et surtout entre eux . Cet accès à la communication a bouleversé la vie de ces jeunes. Au début la moitié venaient au projet pieds nus, maintenant ils ont tous des chaussures, ils postent des photos avec des habits neufs, ils demandent pâtes et brosses à dents, sont au courant de tout ce qui se passe en nouveauté musicale, premier League, Leaga, etc. Ils m’ont tellement m’ont battu avec des scores-fleuve en PlayStation que je n’y joue plus. Sans parler de certains qui mixent du son, font des montages vidéo et photo dans des chaines YouTube avec des beaucoup d'abonnés. Nous faisons ce qu’on peut pour l’éducation de ces jeunes, mais en toute modestie je sais que ce qu’ils voient et entendent sur les réseaux en sont pour quelque chose. Je ne sais pas où cela va mener, mais il y a une nécessité à faire évoluer les daara dans une autre dimension, je vois un fossé qui s’agrandit entre les jeunes et les marabouts.